UN BEL EXEMPLE DE PATRIOTISME ! 

J'évoquais dans un article la croix des Quatre Vents " sauvée " grâce à l'intervention du docteur Gouraincourt . Cet article me sert de transition pour évoquer à nouveau Achille Gouraincourt par une lettre manuscrite destinée au préfet de l'Allier. La guerre franco-prussienne de 1870 fait rage . La France , mal équipée manque de fusils et d'hommes et subit de marquantes défaites. On fait appel à la Garde Nationale mobile. Dans les villages on réquisitionne suivant leur taille,  fusils et hommes jeunes ( sur tirage au sort ) , mais aussi du foin pour les chevaux et du bétail pour nourrir les soldats.
Le nombre de blessés croît considérablement . Dans une circulaire ,  le Préfet de l'Allier ( le baron Edmond Charles Nicolas Servatius ) fait appel aux bonnes âmes afin d'héberger , pour ceux qui le peuvent , les blessés de guerre.
Achille Gouraincourt ( cf mon article docteur Gouraincourt , médecin de pauvres ) , médecin aide-major au 2ème bataillon des mobilisés de l'Allier pendant la guerre de 1870 , adjoint au maire de Franchesse , répond favorablement au souhait du préfet dans une lettre écrite le 2 septembre 1870. Cette missive , écrite dans un français vieilli avec certaines expressions exquises et disparues ( nous sommes au XIXe ) nous en dit long sur le grand patriotisme de son auteur.
En voici la teneur  ( au dessous une copie de l'original ):
" Au château des Quatre Vents , Franchesse , le 2 septembre 1870 .
A Monsieur le Préfet ,
J'ai l'honneur de répondre aux demandes de votre circulaire relative aux soins à donner dans notre commune aux blessés de notre vaillante armée à titre de complément , je suis heureux de vous dire que vous pouvez compter en toute occurrence sur mon patriotisme le plus absolu . Si vous voulez bien m'envoyer chez moi   deux blessés et même plus , je les hébergerai à mes frais exclusivement .Je suis comme vous le savez docteur en médecine . Je leur fournirai à mes frais :
1°) la nourriture la plus confortable 
2°) mes soins médicaux
3°) tous les médicaments , linges …
Si vous en envoyez dix à l'école des religieuses de Franchesse (1) , je les soignerai gratuitement .Je fournirai tout ce qui sera du ressort de ma profession , charpie (2), linge et médicaments et le tout absolument gratuitement . Je serai à leur service jour et nuit .Quant à la fourniture des lits et accessoires ,je me fais fort de trouver ce qu'il faudra . Lors donc comptez sur le zèle d'un docteur dévoué et d'un bon français comme je suis ( sic ). Recevez , Monsieur le Préfet , en attendant nos ordres l'assurance de mon plus parfait dévouement.
signé Docteur Gouraincourt , adjoint au maire de Franchesse .

10 lits chez les sœurs de Franchesse 
2 chez moi
Total : 12 et plus chez moi si besoin est .

Le site de Franchesse est admirable sous le rapport de la plus entière salubrité . Le pays est sur une éminence (3) ; mon château se trouve dans des conditions admirables pour guérir nos pauvres blessés et je vous prie de mettre mon bon vouloir à l'œuvre, vous serez satisfait de mon entrain et de mon patriotisme sans bornes .
Recevez donc à nouveau , Monsieur le Préfet ,mes salutations les plus respectueuses ,
Docteur Gouraincourt . 


(1) cf mon article sur l'école des religieuses de " TIVOLI "
(2) charpie , terme vieilli pour désigner ces morceaux de toile usée découpés utilisés comme pansements .
(3) Situé sur une éminence ; situé sur une hauteur isolée d'où l'on voit de tous côtés ( Larousse ) , le village de Franchesse avait la réputation d'avoir un air très sain et vivifiant , favorable à la guérison . C'est sur ces recommandations médicales que fût érigé par Mme Couhard le manoir à Lavau ( cf mon article " le château de la Couhard" )pour son fils malade.

Un grand merci à L.Delallier pour le partage de ce magnifique document.
Alexandre Cornieux