dimanche 19 février 2017

LE DESTIN TRAGIQUE D'UNE JEUNE FRANCHESSOISE

La nature humaine est complexe parfois , tantôt capable de sublimer ce qu'elle entreprend dans le domaine des Arts , tantôt capable de se surpasser dans l'ignominie et l'abject , dévoilant ses plus vils instincts , comme la destruction massive d'êtres humains dans les camps de la mort. 


Je pensais notre quiète bourgade à l'abri de cette horreur même si ,elle aussi a connu  les rigueurs de la guerre et les privations. Je me trompais. Une jeune femme de Franchesse , une enfant du pays , a connu l'enfer concentrationnaire et y laissera sa vie loin , si loin de chez nous. 

Andrée BODARD est née le 16 mai 1925 à Franchesse à Gatelière , fille de Joseph (1886-1963 ) et de Lucie Margot ( 1896-1990 ), cultivateurs au Lieu Belin .Écolière ,elle fréquente comme les autres enfants de son âge l'école communale de Franchesse ,et obtient son certificat d'études primaires le 2 juin 1937.
Plus tard , elle est placée comme bonne à tout faire à Bourbon l'Archambault puis va commettre un "délit mineur" ( petits vols ?chapardages?).
Elle est arrêtée en mai 1942 par les gendarmes, peut être le 4 mai. J'avance  , mais ce ne sont que des supputations la date du 4 mai car c'est aussi le lundi 4 mai 1942 qu'une autre jeune fille d'une quinzaine d'années est également arrêtée par la gendarmerie de Bourbon pour vols : la jeune Olga DOUMTCHEFF, qui ,  en 1942 était giletière et habitait chez ses grands parents , rue de la Sainte Chapelle à Bourbon.



Article du journal Le Centre daté du mercredi 6 mai 1942

Le destin des deux jeunes filles est étroitement lié , nous le verrons plus tard.

Arrêtée donc , la jeune Andrée BODARD n'aura  pour choix que d'aller en prison ou alors partir comme travailleuse volontaire en Allemagne . Quel merveilleux choix pour une gamine de 17 ans...
 Elle choisit le travail en Allemagne. Mineure , c'est son père Joseph qui signera sa demande au bureau d'embauche de Moulins. J'imagine la terreur de cette jeune femme à  l'idée de se retrouver en prison ,pour choisir l'option cruelle de l'exil en Allemagne.

Andrée BODARD part avec Olga DOUMTCHEFF pour Nuremberg en juillet 42.Elles résident toutes les deux à l'adresse suivante :
Nuremberg Sud,
Firma Niedermeier au n°7 de la Schönerstrasse.

Je ne dispose que de peu d'informations sur la" firma," la société Niedermeier , si ce n'est que cette dernière fabriquait dans les années 30 des jouets en métal embouti. Nul doute qu'elle se soit sûrement diversifiée dans l'armement pour soutenir l'effort de guerre nazi. Je ne peux qu'imaginer ce qu'ont dû vivre les deux jeunes françaises en Allemagne : le voyage , l'arrivée dans un pays hostile , la barrière de la langue et surtout les cadences infernales dans les usines , peut être pis encore.

 

Du 23 au 25 janvier 1943, Andrée BODARD est internée à la prison de Nuremberg pour " contact interdit". Puis , le  29 août 1944 , elle est internée une deuxième fois pour s'être volontairement blessée. Les cas d'automutilation n'étaient pas isolés , où on espérait de la sorte un peu de répit à l'infirmerie et échapper pour un moment à l'enfer des cadences dans les usines d'armement.


Puis , selon le livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation ,la jeune Andrée BODARD est transférée à Lauban ,prison réservée aux déportés Nacht und Nebel ( Nuit et Brouillard), puis à Breslau où siège le Tribunal chargé des affaires NN.

Mais , selon l'International Tracing Service , Andrée est transférée au camp de Langenzenn , puis transférée  à nouveau à la prison de Nuremberg le 28 septembre 1944 , avant d'être envoyée le 25 octobre au terrible camp pour femmes de Ravensbrück ( elle arrive au camp le 27).
Ravensbrück , camp de la mort pour femmes où tant d'atrocités furent commises ( expériences médicales , euthanasies de masse )


Mais , d'après les documents du camp de concentration de Flossenbürg , la jeune femme était " fichée : protective custodian political " ( détention de sûreté politique ). Elle arrive à Flossenbürg le 11 novembre 1944 et est affectée au Kommando de Graslitz ( camp qui reçoit surtout des femmes pour travailler dans l'usine d'appareillage d'aviation Hermann Göring ).

Andrée BODARD décède , ( d'après le livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation ) le 29 décembre 1944, le même jour à l’hôpital de Graslitz ( selon l'International Tracing Service).
La jeune femme serait décédée le 6 janvier 1945 à Flossenbürg ( d'après les documents du camp de concentration de Flossenbürg ).

 Source :
 AFMD de l'Allier ( Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation ) 
 Ancestry.com

Remerciements :
Un grand merci à Monsieur le Président de l'AFMD de l'Allier pour son aimable autorisation.
Merci  à Isabelle ( photos de classe de Franchesse )





Pour  Andrée ( Franchesse 16 /5/1925 - 12/1944 Graslitz - 01/1945 Flossenbürg ) 20 ans  , pour Olga ( Vichy 15 /08/ 1926 - 4 /04/1945 gazée à Ravensbrück ) 19 ans ,   victimes de la barbarie nazie.
Elles ont tellement payé cher leurs bêtises de jeunesse.




 Pour elles ,
 Pas une stèle , pas une tombe pour essuyer nos pleurs.
 Pas une croix ni même un tertre où déposer nos fleurs .




 Alexandre Cornieux



J'ai besoin de votre aide .
Parce qu'il est important pour moi de mettre un visage sur un nom , vous trouverez ci-dessous  5 photos de classe de l'école communale de Franchesse ( période 1933-1939 ). Je reste persuadé qu'Andrée BODARD figure sur une de ces photos .Si vous l'avez reconnue , si vous disposez d'informations supplémentaires , n'hésitez pas à me contacter. ( merci de ne pas reproduire les photos )




 
ANNÉE 1936-1937



ANNÉE 1939









ANNÉE 1936

ANNÉE 1937





ANNÉE 1933-1934

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