jeudi 11 juin 2015

LA REVOLTE DES LANCIERS PENDANT LA TERREUR BLANCHE

La Terreur Blanche, période trouble de l'Histoire qui voit le retour de la monarchie en France,est marquée par de nombreux incidents liés aux guerres,mais aussi par la misère qui touche les basses couches de la population. 

En 1816, les arrondissement de Moulins et de Montluçon voient leur récolte de toute nature tomber en dessous de la moyenne.
Afin d'enrayer la hausse des grains, et de diminuer la cherté du pain,Louis XVIII accorde des primes pour importer froment,seigle, orge et autre avoine.Ce sera l'inverse qui arrivera car cette mesure servit surtout à enrichir les spéculateurs et les gros propriétaires (qui préfèrent vendre aux marchands de gros à meilleur prix plutôt qu'au détail à la population)tant et si bien que dès 1816 le blé monte à 5 francs le double-décalitre, jusqu'à 7 francs en 1817.Pourtant il ne manquait pas dans les greniers,mais sa cherté le rendait inaccessible aux plus démunis.
La misère devient générale.En Bourbonnais, ce sont surtout les journaliers, les tailleurs de pierre,les maçons et les charpentiers qui souffrent le plus de la faim,les laboureurs s'en tirant mieux car les maîtres leur avancent les grains nécessaires à leur consommation personnelle.
Les petites gens, taraudés par la faim,convaincus à raison d'être les victimes des gros propriétaires et des spéculateurs ne tardent pas à se révolter.

Le 29 avril 1816,à Franchesse des bandes d'ouvriers s'opposent avec violence à l'enlèvement du blé que les sieurs Chassey ont déposé chez Mauplain l'aubergiste.Prévenu, le Préfet de l'allier décide d'envoyer des troupes pour étouffer les émeutes.Il confie son intention à De Neuville,(*) le Maire de Bourbon.Celui-ci, par naïveté s'empresse de le dire à ses administrés et communique même le jour et l'heure où les troupes se mettraient en mouvement.Ainsi bien informés,les ouvriers de Bourbon s'empressent de le dire aux Lanciers et promettent même de les aider.

Le 6 mai, le tocsin sonne à Bourbon et bientôt un foule énorme d'hommes et de femmes,portant des pieux, des fourches, et des mauvais fusils se dirigent sur Franchesse.Arrivée dans le village,toute la population se tient debout et lance des injures à l'adresse des spéculateurs.A la tête des émeutiers, le plus virulent d'entre eux,Gilbert Barathon interpelle l'adjoint de la commune: "nous avons faim,il faut nous livrer le grain déposé chez Mauplain ! Et nous le vendre à 2francs 50 le double-décalitre ! Prétextant qu'il n'en a pas le droit,l'adjoint prévient la gendarmerie de Bourbon.

Pendant ce temps,Jean Foucrier,manoeuvre à Limoise,vient grossir les rangs des émeutiers, à la tête de 60 individus armée de bâtons et de fourches.

Lorsque les gendarmes arrivent,Gilbert Barathon met en joue le brigadier et soudain un autre le frappe violemment de sa fourche.Fort heureusement,les gendarmes ne se servent pas de leurs armes: les insurgés les désarment et les retiendront prisonniers jusqu'au lendemain matin ! L'adjoint de Franchesse finit par distribuer le blé de chez Mauplain aux villageois pour 2francs50 le double décalitre.C'est tout ce qu'ils voulaient !
Pour fêter cela Foucrier et les siens allèrent chez la veuve Saulnier(elle tenait une buvette à Franchesse)mais partirent sans payer,prétextant qu'ils avaient oublié leur bourse !

A Bourbon,les ouvriers eux aussi voulaient le blé à 2francs50,puisque les Lanciers l'avait obtenu à ce prix.D'autres incidents éclatent : Lorme, laboureur au domaine de Lavaux à Franchesse fut injurié par des ouvrières en haillons parce que celui-ci avait vendu 29 boisseaux de froment à un marchand de gros.

Devenues inévitables, les émeutes reprennent à Bourbon et ce sont les Lanciers qui à leur tour viennent prêter main forte aux gars de Bourbon avec les mêmes Foucrier,Barathon et Jean Patouillard !

Le Maire, De Neuville tente d'empêcher la garde nationale d'intervenir craignant une effusion de sang  et dit: ils ont faim ! Ils veulent du blé,il faut le leur en donner !
Après d'âpres discussions et délibérations entre le maire ,les gros propriétaires et autres spéculateurs,la décision est prise de céder le blé à 2francs50,comme à Franchesse quelques jours auparavant.

 Cette salutaire décision permit finalement d'éviter un massacre.Les Lanciers ne se sont pas révolté pour rien , ils avaient gagné !


(*)Hercule De Neuville, maire de Bourbon l'Archambault avait la réputation d'être un homme au grand coeur, mais d'une grande naïveté,il sera jugé pour son inaction face aux émeutes,et sera révoqué quelques mois plus tard !


Et si le terme Lancier tirait son origine de cette page d'histoire locale ?Je le pense très sincèrement,mais cela n'engage que moi !

Alexandre Cornieux

Texte écrit d'après le livre" la Terreur Blanche dans le Bourbonnais Seconde Restauration"par le docteur Jean Cornillon (1846-1936) publié en 1913.

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